Appel au droit à bien manger
Paris, le 24 février 2017
Nous vivons aujourd’hui une véritable fracture alimentaire.
Tandis qu’une frange privilégiée de la population a accès à une éducation du goût et à des produits de qualité, la majorité des citoyens est soumise à un paysage de consommation dicté par la grande distribution. Cette fracture est certes largement liée au niveau des revenus du foyer et aux catégories sociales, mais elle est aussi profondément culturelle. Elle est liée à une certaine idée de la place de l’alimentation dans la vie, à une culture des goûts qui se construit dès l’enfance, à un savoir-faire qui se transmet ou s’apprend, à une cuisine du quotidien rapide, goûteuse, et saine.
Une autre fracture sépare le monde agricole des consommateurs. L’industrialisation massive de l'agriculture française aboutit à ce paradoxe : la plupart des agriculteurs, soumis à la culture intensive, ne nourrissent plus leurs concitoyens. La course à la productivité, à l’export, et aux tarifs les plus bas, a eu pour conséquence l’anéantissement de l’agriculture vivrière de nombreux pays.
Peut-on accepter que nos enfants et petits-enfants ne disposent ni de la qualité, ni de la diversité alimentaire qui sont encore, mais de façon fragile, les nôtres aujourd’hui? Peut-on accepter que notre alimentation et ses modes de production soient cancérigènes et sources de maladies quand elle devrait apporter santé et bien-être ?
Peut-on accepter de léguer aux générations futures des territoires pollués?
Comme tant d'espèces animales en voie de disparition, des milliers de variétés de fruits, légumes et poissons, sont progressivement rayés de notre carte alimentaire.
Nous ne pouvons nous résigner à manger ce menu unique, offrant pour seule abondance des produits uniformisés et insipides, au détriment de notre santé.
Agriculture, environnement, santé, économie, culture, éducation : tous les piliers de notre société contemporaine sont concernés par ce péril alimentaire. Il ne s’agit pas d'un débat de riches ou de pauvres, ni d’une question patrimoniale, régionaliste ou nationaliste : les enjeux alimentaires dépassent aujourd'hui de très loin les frontières et nous affectent tous, citoyens, producteurs ou consommateurs, au quotidien.
Pour lutter contre ces menaces grandissantes, l’accès au « bien manger » ne doit pas être un privilège mais un droit inaliénable et indépendant de toute notion de revenu. Aucun citoyen ne doit être mis à l’écart de ce droit pour des raisons économiques, sociales ou culturelles. Si l'on ne fait rien, la majorité des agriculteurs et éleveurs ne seront bientôt plus que de simples ouvriers à la solde de multinationales « hors sol ». Ce fléau impacte directement nos sphères privées ou publiques, que l'on mange à la maison, à la cantine ou au restaurant.
Par cette tribune, nous revendiquons un droit au bien manger pour tous les citoyens. Ce n'est ni luxe ni une utopie : il est possible et impératif de mettre en place des actions concrètes pour défendre une alimentation goûteuse et saine ainsi qu’une agriculture qui soit durable pour ses producteurs comme ses consommateurs, pour les hommes comme pour la terre.
De nombreuses études (comme celle effectuée par l’INRA à la ferme permacole du Bec Hellouin en Normandie, l’étude de Kevin Morel ou comme les prospectives du scénario Afterres2050 mené par l’agence Solagro) prouvent qu’une agriculture paysanne, réduisant les intrants chimiques, utilisant des semences rustiques et fondée sur des principes agro-écologiques plutôt que sur des bases productivistes, peut nourrir une population grandissante, avec des produits de meilleure qualité, en réduisant l’empreinte écologique des cultures ainsi que les dangers pour la santé de tous. Il est nécessaire d’instaurer une véritable éducation du goût dans les écoles publiques, qui s’inscrive dans le programme et l’alimentation scolaire.
Cette déclaration se veut aussi un appel aux responsables politiques, candidats à la prochaine élection présidentielle française de mai 2017. Nous leur demandons de s'emparer de cette question, nous leur demandons de prendre la mesure du péril alimentaire qui nous guette, nous leur demandons de répondre autrement à cet enjeu que par des décisions anecdotiques ou purement symboliques. Les prochains présidentiables doivent intégrer cette question essentielle dans leurs programmes et prendre des mesures dans les domaines agricoles, alimentaires, culinaires et éducatifs, pour soutenir et développer ce droit de tous au bien manger. Ce droit va de pair avec une alimentation plus équilibrée et mieux partagée, une agriculture plus respectueuse des hommes et de la nature, et plus généralement, de meilleures pratiques citoyennes.
Il est essentiel de se mobiliser et d’agir dès maintenant, pour que les générations futures puissent manger et vivre mieux demain qu’aujourd’hui.
Pour signer la pétition, rejoignez -nous sur Atabula
SIGNATAIRES
Olivier Roellinger, chef de cuisine des Maisons de Bricourt
Franck Pinay-Rabaroust , fondateur de la plateforme Atabula
Camille Labro, journaliste culinaire
Pierre Hivernat, fondateur de la plateforme Alimentation Générale
Eric Roux, porte-parole de l’Observatoire des Cuisines Populaires
Xavier Hamon, cuisinier Comptoir du Théatre
Laurent Terrasson, journaliste
Alexandre Gauthier, chef de cuisine La Grenouillère
Michel Troisgros, chef de cuisine Maison Troisgros
Michel Bras, chef de cuisine de la Maison Bras
Mauro Colagreco, chef de cuisine du Mirazur
David Toutain, chef cuisinier
Roland Feuillas, paysan boulanger
Mathieu Lapierre, vigneron nature
Christophe Collini, paysan maraîcher
Linda Bedouet et Edouard Stalin, producteurs maraîchers
Grégory Delassus, éleveur bio
Laurence Mahéo, ostréicultrice traditionnelle
Charlotte de Clerck, agriculture et agroforesterie
Julien Fouin, éditeur et restaurateur
Maxime de Rostolan, fondateur des Fermes d'Avenir
Julien Dumas, chef de cuisine au Lucas Carton
Jean Imbert, chef de cuisine L’Acajou
Paule Masson, journaliste
Gisèle Taxil, architecte paysanne
Lili et Jean-Christophe Moyses, paysans boulangers
Charles et Lauriane Durant, éleveurs en polyculture
Olivier Durand, paysan maraicher
François-Régis Gaudry, animateur culinaire
Olivier Assouly, philosophe
Lionel Astruc, auteur, festival La bio dans les étoiles
Bartabas , académie équestre de Versailles
Périco Legasse, journaliste
Christian Boltanski, artiste
Sophie Bramly, productrice
Gilles Clément, paysagiste
Alex Croquet, boulanger
Olivier Darné, plasticien, apiculteur urbain
Philippe Desbrosses , défenseur des semences paysannes
Pierre-Alexis Dumas, directeur artistique d’Hermès
Gilles Fumey, enseignant chercheur en géographie culturelle
Philippe Gombert, président de l’ Association Relais & Chateaux
Jean-Claude Ellena, parfumeur
Bruno Mantovani, directeur du conservatoire de musique et de danse de Paris
Xavier Mauduit, écrivain et journaliste
Annette Messager, artiste
Jonathan Nossiter, réalisateur et écrivain
Esterelle Payany, journaliste culinaire
Natacha Régnier, comédienne
Jean-François Rial, PDG de l’agence Voyageurs du Monde
Georges Rousse, photographe
Julia Scergo, historienne
François Simon, journaliste
Louis Sclavis, musicien
Ryoko Sekigushi, écrivaine
Denise et Daniel Vuillon, producteurs maraichers, fondateurs des AMAPs
Elsa Wolinski
Nous vivons aujourd’hui une véritable fracture alimentaire.
Tandis qu’une frange privilégiée de la population a accès à une éducation du goût et à des produits de qualité, la majorité des citoyens est soumise à un paysage de consommation dicté par la grande distribution. Cette fracture est certes largement liée au niveau des revenus du foyer et aux catégories sociales, mais elle est aussi profondément culturelle. Elle est liée à une certaine idée de la place de l’alimentation dans la vie, à une culture des goûts qui se construit dès l’enfance, à un savoir-faire qui se transmet ou s’apprend, à une cuisine du quotidien rapide, goûteuse, et saine.
Une autre fracture sépare le monde agricole des consommateurs. L’industrialisation massive de l'agriculture française aboutit à ce paradoxe : la plupart des agriculteurs, soumis à la culture intensive, ne nourrissent plus leurs concitoyens. La course à la productivité, à l’export, et aux tarifs les plus bas, a eu pour conséquence l’anéantissement de l’agriculture vivrière de nombreux pays.
Peut-on accepter que nos enfants et petits-enfants ne disposent ni de la qualité, ni de la diversité alimentaire qui sont encore, mais de façon fragile, les nôtres aujourd’hui? Peut-on accepter que notre alimentation et ses modes de production soient cancérigènes et sources de maladies quand elle devrait apporter santé et bien-être ?
Peut-on accepter de léguer aux générations futures des territoires pollués?
Comme tant d'espèces animales en voie de disparition, des milliers de variétés de fruits, légumes et poissons, sont progressivement rayés de notre carte alimentaire.
Nous ne pouvons nous résigner à manger ce menu unique, offrant pour seule abondance des produits uniformisés et insipides, au détriment de notre santé.
Agriculture, environnement, santé, économie, culture, éducation : tous les piliers de notre société contemporaine sont concernés par ce péril alimentaire. Il ne s’agit pas d'un débat de riches ou de pauvres, ni d’une question patrimoniale, régionaliste ou nationaliste : les enjeux alimentaires dépassent aujourd'hui de très loin les frontières et nous affectent tous, citoyens, producteurs ou consommateurs, au quotidien.
Pour lutter contre ces menaces grandissantes, l’accès au « bien manger » ne doit pas être un privilège mais un droit inaliénable et indépendant de toute notion de revenu. Aucun citoyen ne doit être mis à l’écart de ce droit pour des raisons économiques, sociales ou culturelles. Si l'on ne fait rien, la majorité des agriculteurs et éleveurs ne seront bientôt plus que de simples ouvriers à la solde de multinationales « hors sol ». Ce fléau impacte directement nos sphères privées ou publiques, que l'on mange à la maison, à la cantine ou au restaurant.
Par cette tribune, nous revendiquons un droit au bien manger pour tous les citoyens. Ce n'est ni luxe ni une utopie : il est possible et impératif de mettre en place des actions concrètes pour défendre une alimentation goûteuse et saine ainsi qu’une agriculture qui soit durable pour ses producteurs comme ses consommateurs, pour les hommes comme pour la terre.
De nombreuses études (comme celle effectuée par l’INRA à la ferme permacole du Bec Hellouin en Normandie, l’étude de Kevin Morel ou comme les prospectives du scénario Afterres2050 mené par l’agence Solagro) prouvent qu’une agriculture paysanne, réduisant les intrants chimiques, utilisant des semences rustiques et fondée sur des principes agro-écologiques plutôt que sur des bases productivistes, peut nourrir une population grandissante, avec des produits de meilleure qualité, en réduisant l’empreinte écologique des cultures ainsi que les dangers pour la santé de tous. Il est nécessaire d’instaurer une véritable éducation du goût dans les écoles publiques, qui s’inscrive dans le programme et l’alimentation scolaire.
Cette déclaration se veut aussi un appel aux responsables politiques, candidats à la prochaine élection présidentielle française de mai 2017. Nous leur demandons de s'emparer de cette question, nous leur demandons de prendre la mesure du péril alimentaire qui nous guette, nous leur demandons de répondre autrement à cet enjeu que par des décisions anecdotiques ou purement symboliques. Les prochains présidentiables doivent intégrer cette question essentielle dans leurs programmes et prendre des mesures dans les domaines agricoles, alimentaires, culinaires et éducatifs, pour soutenir et développer ce droit de tous au bien manger. Ce droit va de pair avec une alimentation plus équilibrée et mieux partagée, une agriculture plus respectueuse des hommes et de la nature, et plus généralement, de meilleures pratiques citoyennes.
Il est essentiel de se mobiliser et d’agir dès maintenant, pour que les générations futures puissent manger et vivre mieux demain qu’aujourd’hui.
Pour signer la pétition, rejoignez -nous sur Atabula
SIGNATAIRES
Olivier Roellinger, chef de cuisine des Maisons de Bricourt
Franck Pinay-Rabaroust , fondateur de la plateforme Atabula
Camille Labro, journaliste culinaire
Pierre Hivernat, fondateur de la plateforme Alimentation Générale
Eric Roux, porte-parole de l’Observatoire des Cuisines Populaires
Xavier Hamon, cuisinier Comptoir du Théatre
Laurent Terrasson, journaliste
Alexandre Gauthier, chef de cuisine La Grenouillère
Michel Troisgros, chef de cuisine Maison Troisgros
Michel Bras, chef de cuisine de la Maison Bras
Mauro Colagreco, chef de cuisine du Mirazur
David Toutain, chef cuisinier
Roland Feuillas, paysan boulanger
Mathieu Lapierre, vigneron nature
Christophe Collini, paysan maraîcher
Linda Bedouet et Edouard Stalin, producteurs maraîchers
Grégory Delassus, éleveur bio
Laurence Mahéo, ostréicultrice traditionnelle
Charlotte de Clerck, agriculture et agroforesterie
Julien Fouin, éditeur et restaurateur
Maxime de Rostolan, fondateur des Fermes d'Avenir
Julien Dumas, chef de cuisine au Lucas Carton
Jean Imbert, chef de cuisine L’Acajou
Paule Masson, journaliste
Gisèle Taxil, architecte paysanne
Lili et Jean-Christophe Moyses, paysans boulangers
Charles et Lauriane Durant, éleveurs en polyculture
Olivier Durand, paysan maraicher
François-Régis Gaudry, animateur culinaire
Olivier Assouly, philosophe
Lionel Astruc, auteur, festival La bio dans les étoiles
Bartabas , académie équestre de Versailles
Périco Legasse, journaliste
Christian Boltanski, artiste
Sophie Bramly, productrice
Gilles Clément, paysagiste
Alex Croquet, boulanger
Olivier Darné, plasticien, apiculteur urbain
Philippe Desbrosses , défenseur des semences paysannes
Pierre-Alexis Dumas, directeur artistique d’Hermès
Gilles Fumey, enseignant chercheur en géographie culturelle
Philippe Gombert, président de l’ Association Relais & Chateaux
Jean-Claude Ellena, parfumeur
Bruno Mantovani, directeur du conservatoire de musique et de danse de Paris
Xavier Mauduit, écrivain et journaliste
Annette Messager, artiste
Jonathan Nossiter, réalisateur et écrivain
Esterelle Payany, journaliste culinaire
Natacha Régnier, comédienne
Jean-François Rial, PDG de l’agence Voyageurs du Monde
Georges Rousse, photographe
Julia Scergo, historienne
François Simon, journaliste
Louis Sclavis, musicien
Ryoko Sekigushi, écrivaine
Denise et Daniel Vuillon, producteurs maraichers, fondateurs des AMAPs
Elsa Wolinski